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34 ans après l'invasion turque, Chypre enterre encore ses morts

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Publié dans iNFO-GRECE le

Le 20 juillet 1974 l'armée turque, prétextant d'une tentative de renversement du président chypriote de l'époque Makarios, entre dans le Nord de Chypre, divise les communautés grecques et turques qui y vivaient et pousse des centaines de milliers de réfugiés à vivre avec une mémoire blessée, à l'image de cette famille qui vient seulement de récupérer les cercueils de ses hommes retrouvés dans une fosse commune.

Les cérémonies officielles de commémoration de la triste invasion de l'île par l'armée turque en 1974 ont été éclipsées par l'office mortuaire de la famille de Charita Mantales, qui enterrait les corps de son père, de son mari et de ses deux gendres, dont les restes des dépouilles ont été retrouvés dans une fosse commune dans les village de Elia, près de Cérynée (Keryneia), dans la partie occupée de l'île.

L'opération, que la Turquie avait alors justifiée au nom de la protection de la communauté chyproturcque, a fait 5000 morts civils et militaires et 1600 disparus chypriotes-grecs, dont l'administration chyproturque de la zone occupée a toujours refusé de donner des nouvelles ou de coopérer pour en trouver la trace, malgré les pressions des Nations Unies. L'ouverture, depuis l'année dernière, des barrages, de part et d'autre de la "ligne verte", qui sépare la zone libre de la zone occupée et contrôlée par les casques bleus, a permis de retrouver quelques corps.

L'invasion turque avait aussi poussé près de 160.000 Chypriotes grecs à quitter leurs foyers dans le Nord de l'île suivis des 40.000 "frontaliers" qui ne voulaient pas vivre près de la ligne de séparation, tandis qu'au cours de l'année suivante 40.000 Chypriotes turcs vivant dans le Sud prirent le chemin inverse en suivant l'appel de l'administration chyproturc qui s'est mis en place dans la zone occupée. Les conditions de vie imposées dans la zone occupée et la forte militarisation (30.000 soldats turcs pour 70.000 civils !) poussèrent des nombreux chyproturcs à l'exil mais la Turquie repeupla aussitôt la zone occupée en important 100.000 paysans des régions pauvres d'Anatolie (Turquie de l'Est), au point que les Chypriotes turcs originaires se trouvent aujourd'hui une minorité dans leur propre pays. Quand aux Chypriotes grecs vivant encore dans le secteur occupé, ils ont évalués à moins de mille.

Malgré cette purification ethnique, l'administration chyproturque du secteur occupé n'a pas réussi à faire reconnaître l'Etat autoproclamé d'une République Turque du Nord de Chypre autrement que par la Turquie à laquelle elle reste affiliée. Cependant, elle réussi à peser fortement dans la balance des négociations menées par les Nations Unies au point qu'un plan de réunification proposé par l'ancien secrétaire général de l'organisation internationale, Kofi Annan, lui accorde des droits symétriques à la représentation grecque alors que son poids démographique n'est que de 18% ! La communauté grecque rejeta à une large majorité le plan lors d'un référendum en 2004.

L'échec de la médiation onusienne a repositionné la question chypriote comme enjeu dans la balance des négociation de la Turquie pour son adhésion à l'Union européenne. Malgré l'arrivée au "pouvoir" dans l'administration chyproturc des modérés, plus présentables dans les pourparlers avec l'Union européenne prête à y déverser sa manne financière en cas d'avancées positives, le comportement reste fortement marqué de la logique séparatiste.

Ainsi ce week-end, est-t-il ponctué, côté chyproturc, de nombreuses manifestations commémorant l'entrée "victorieuse" de l'armée turque sur l'île et mettant en scène le pouvoir de l'administration au rôle de "gouvernement" auquel le premier ministre turc, Recep Tayyip Erdoğan, qui assistera aujourd'hui au défilé militaire organisé par le soi-disant gouvernement de l'autoproclamé Etat turc de Chypre du Nord, apportera sa caution.

"La présence de Recep Tayyip Erdoğan dans la partie occupée de l'île ne contribue pas aucunement à l'amélioration des conditions préalables à la résolution de la question chypriote", a dénoncé les Président de la République de Chypre, Dimitris Christofias.

Cependant, a insisté M. Christofias, les opinions de M. Erdogan ne feront pas fléchir la position de la République chypriote dans le soutien d'une solution du problème déterminée par les résolutions des Nations Unies et le droit international et européen.

"Nous continuerons à montrer notre bonne volonté, prêts pour une solution ; nous avons toujours la main tendue et nous attendons qu'en face une autre vient nous la serrer", a notamment dit le président chypriote, avant de conclure que "un jour comme celui-là, est un jour d'honneur à ceux qui sont tombés pour la patrie mais doit aussi être un jour de réflexion sur le comment sortir de l'impasse et trouver une solution à ce problème qui, malheureusement, conduit progressivement à la division définitive de l'île".

i-GR/CNA

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